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L’an 66 de la Guinée : “Que s’est-il réellement passé la veille du 2 octobre 1958 ?”
Dr. IFONO, témoin de l’histoire

L’an 66 de la Guinée : “Que s’est-il réellement passé la veille du 2 octobre 1958 ?”
Dr. IFONO, témoin de l’histoire

L’an 66 de la Guinée : “Que s’est-il réellement passé la veille du 2 octobre 1958 ?”

(Dr. Ifono, témoin de l’histoire )

La Guinée célèbre ce mercredi 02 octobre 2024, l’an 66 de son indépendance. Mais dans quel contexte ce premier pays de l’Afrique francophone  a-t-il accédé à son indépendance ? Notre rédaction a rencontré Docteur Aly Gilbert Ifono, historien et ancien Ministre de la culture, sous le régime de feu Ahmed Sékou Touré. 

 

Guinée FIRST : Aujourd’hui, la Guinée célèbre les 66 ans de son indépendance. Dites-nous dans quel contexte le pays a accédé à son indépendance ?

Dr Aly Gilbert Ifono : L’histoire de l’indépendance de la Guinée est très intéressante à raconter. Elle remonte à la fin de la seconde guerre mondiale qui n’a pas satisfait les Africains comme ils le souhaitaient. C’est-à-dire après la victoire de la France, ils attendaient leurs libérations du jungle colonial. On leur a proposé le réaménagement intérieur, ce réaménagement qui n’était pas du tout du goût des Africains, contenait quand-même des éléments intéressants parce qu’on leur avait donné des possibilités de faire de la politique, de faire élire dans les assemblées de leurs pays, de se faire représenter dans les assemblées métropolitaines. Alors, il y a des cadres qui ont profité de cela pour s’intéresser à la vie politique. Dans cet élan, naît à Bamako en 1946, les RDA. C’est la première formation Fédérale Africaine. Le RDA devait être représenté dans chaque colonie, en Guinée c’est le PDG. Le PDG donc dirigé à l’époque par Ahmed Sékou TOURÉ  et certains de ses compagnons va entreprendre la lutte d’élections en élection, jusqu’en 1957, la dernière élection le PDG a fini par conquérir de l’audience. En face le problème pour le PDG c’était d’abord la lutte pour reconquérir. Il y avait une opposition, mais très faible, représentée par le BGAB de BARRY Djayandou, par la DSG de BARRY 3, mais les deux parties d’opposition s’entendaient sur un terrain que le PDG avait quand même de l’audience de jouer au haratine. Donc ils ont accepté de se joindre au PDG pour battre campagne en faveur du “NON” certainement ils sont le parti minoritaire, mais quand-même ils ont rejoint les rangs et ce qui a conduit au vote massif du 28 septembre 1958. Le 02 octobre, la Guinée a proclamé son indépendance, et tous ceux qui ont participé au mouvement, opposition mouvance, obedience PDG, tous ont été associés à la gestion du nouvel État on n’a exclu personne. Ces leaders ont d’ailleurs occupé de hautes fonctions ministérielles.>>

 

Guinée FIRST : Que s’est réellement passé pour que ces formations acceptent d’accompagner le PDG RDA ?

Docteur Aly Gilbert Ifono : Ils ont vu l’intelligence du terrain, ils ont compris que le PDG était fort donc, il ne fallait pas se leurrer, même si eux ils avaient le soutien de l’administration coloniale, mais sur le terrain le PDG était très fort. Donc ils ont fait profile bas epuis ce sont engagés, après on sait que c’est à deux semaines du vote du 28 septembre qu’ils ont ralié le PDG. Donc l’indépendance acquise, le PDG n’a exclu personne, il a associé tout le monde dans la gestion du pays, mais chacun avait ses petits calculs. Ils ont oublié que le PDG était dirigé par des cadres qui savaient ce qu’ils voulaient. Ils surveillaient mutuellement, ils ont compris que le choix du PDG ne leur convenait pas et donc les coûts de pédale ont commencé dans les rapports, c’est ainsi que tous ceux de l’opposition qui ont participé, ceux sont retrouvés dans des difficultés et finalement ils ont été exclus de la gestion du parti. Et beaucoup sont allés en prison. Il y en a qui sont allés en aventure.

 

Guinée FIRST: De nombreux observateurs pensent que le retard de la Guinée est dû au “NON ” face à la France. Qu’en dites-vous ?

Dr Aly Gilbert Ifono: Non ! pas du tout. Comment on peut le dire ? La liberté n’a pas de prix, elle n’est comparable à rien. Ils ont peut-être leurs raisons, c’est peut-être des conséquences du choix du 28 septembre qui nous ont coûté  certaines difficultés de parcours, parce que DE GAULLE dans sa tournée de campagne en faveur de sa constitution, est venu à Conakry pour nous la proposer. Mais la Guinée a dit qu’elle préférait vraiment être libre “dans la pauvreté que d’être riche dans l’esclavage”. Il y en a qui ont dit qu’on n’est pas  surpris que la Guinée ait choisi de vivre dans la pauvreté, ce n’est pas vrai. La liberté est intéressante, elle est utile à tout le monde il ne faut pas que l’on croit que parce qu’ on a quitté la France qu’on n’est pauvre non, on n’a quitté la France c’est vrai, mais c’est parce que la France n’a pas digéré la façon qu’on l’a quittée, qu’elle nous a sanctionné. Elle a rompu deux  ou trois ans ses relations. C’étaient des palabres pour qu’elle accepte qu’on loue des relations diplomatiques avec elle. Mais laborieusement on n’est parvenu, mais en quittant Conakry, DE GAULLE avait dit aux gens en indexant Sékou TOURÉ que voici un homme avec lequel je ne m’entendrez jamais. Je le ferai ramper à plat ventre, ça c’était des défis qu’il fallait minimiser.  Et effectivement même après DE GAULLE, les gens de la France profonde ont continué à suivre le chemin tracé par leurs mentors. La Guinée avait d’autres possibilités puisque on a eu le soutien de beaucoup de pays progressistes à travers le monde. Beaucoup de cadres sont venus parce que les Français avaient retiré les enseignements, les techniciens, tout le monde jusqu’à la banque centrale. Ces pays ont envoyé leurs cadres pour que la Guinée puisse démarrer. Même des Guinéens qui étaient en formation, les militaires, ils sont tous rentrés pour venir au secours du pays. En Afrique, vous avez des togolais venus en grand nombre des enseignants c’est ce qui fait que la Guinée a pu démarrer. Bon le reste maintenant c’est les conséquences du parcours, il y a des hauts et des bas, mais qu’on ne dise pas que c’est parce qu’on n’a choisi  d’être indépendant qu’on n’est pauvre, c’est pas vrai.

 

Guinée FIRST : En tant qu’historien de 1958 à maintenant, quelle lecture faites-vous de notre indépendance ?

Dr Aly Gilbert Ifono : C’est d’abord le plaisir d’être indépendant ce qu’on ne pouvait pas faire au temps colonial, aujourd’hui nous sommes libres, nous avons créé notre monnaie, nous avons créé notre armée, nous avons avons constitué notre gouvernement, nous avons utilisé nos cadres, nous avons tracé notre voie de développement. Qu’est-ce que vous voulez encore ? Ce sont les avantages de la liberté, ce qu’on ne pouvait pas faire sous le régime colonial. Donc de l’indépendance à nos jours, nous sommes maître de notre destin, si ça marche tant mieux on ne s’en prend à personne, et si ça ne marche pas, c’est les conséquences. Il faut arrêter de croire que c’est toujours le colonialisme, jusqu’à un moment  donné OK, mais le reste c’est nous même. Parce qu’il y a sincèrement des Guinéens sincèrement, ils se sont mis au travail et d’autres ont utilisé leurs positions pour s’enrichir au détriment du peuple. C’est pour ça que beaucoup sont allés en prison pour avoir détourné les biens publics, et naturellement ça ne peut plaire non plus mais l’indépendance il y a rien de beau que d’être libre.

 

Guinée FIRST : Y’a rien de plus beau que d’être libre, voilà que nous célébrons l’an “66”. Quel est votre message fort et à qui vous souhaitez bonne fête d’indépendance?

Dr Aly Gilbert Ifono : Le message fort c’est d’avoir foi en l’avenir de ce pays. C’est vrai qu’il a eu beaucoup de situations malencontreuses, mais ce n’est pas la fin du monde je crois qu’ il faut espérer, nous avons connu des transition militaire c’était pas souhaité. Il y a des raisons qui justifient justement l’irruption des militaires sur la scène politique. Certains militaires ont bien fait d’autres n’ont pas fait ce qu’on attendait d’eux, mais de façon générale il y a à espérer parce que ce pays est riche malgré tout ce qu’il y a eu comme malversation il y’a encore de la richesse il suffit d’avoir un bon leadership pour jouir les bienfaits que nous a donnés la nature. La bonne fête naturellement c’est à vous journalistes qui venez me tendre votre micro. Bonne fête à toutes les femmes parce que l’anniversaire est dédié essentiellement aux femmes. Donc bonne fête à toutes les Guinéennes et tous les Guinéens en avant pour le travail, du courage, l’avenir est prometteur.

 

Guinée FIRST : Merci à vous Docteur Aly Gilbert Ifono! .

Dr Aly Gilbert Ifono : Merci à vous aussi !

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